L'aliment interdit est à consommer sans modération
Les autorités de santé vous répètent sur tous les tons que
les graisses sont mauvaises pour la santé, et en particulier les graisses
saturées.
Tout le monde ou presque le croit, bien que peu de personnes
sachent ce que veut dire au juste graisses « saturées ». Mais est-ce important
? Pas besoin d'avoir fait dix ans de médecine pour imaginer que quelque chose
de « saturé », c'est forcément mauvais pour la santé, n'est-ce pas ?
« J'sature ! »
En réalité, un acide gras « saturé » est simplement un acide
gras dont tous les atomes carbone sont liés au nombre maximal d'atomes
d'hydrogène. Chaque liaison carbone est occupée, et on ne peut plus ajouter
d'autres atomes.
La conséquence est que la molécule est plus stable, et moins
susceptible de s'oxyder. C'est une très bonne chose car les graisses oxydées
sont plutôt mauvaises pour la santé. Selon plusieurs études, le cholestérol
oxydé est un marqueur de l’athérosclérose, le vieillissement et le
rétrécissement des artères, facteur d'accident cardiaque. (1)
Mais ce n'est pas tout.
L'alimentation traditionnelle de l'être humain, avant
l'introduction massive des céréales, était extrêmement riche en acides gras
saturés. Nos ancêtres, avant l'invention de l'agriculture, mangeaient en effet
beaucoup de graisse d'animaux, d'entrailles, de crustacés riches en graisses.
Les quelques tribus à travers le monde qui ont conservé un
mode de vie traditionnel mangent, elles aussi, très gras. Vous avez les Inuits
(Esquimaux) de l'Arctique qui, jusqu'à récemment, mangeaient essentiellement de
la graisse de phoque, de morse, de baleine, des poissons gras, qui contiennent
une forte proportion de graisses saturées.
Les Maasaïs, une ethnie semi-nomade qui vit de l'élevage et
de la chasse, au Kenya, se nourrit surtout d'un mélange de lait et de sang,
prélevé sur les jeunes bovins sans les tuer, auquel ils ajoutent plantes,
racines, écorces, et de nombreux végétaux. Là aussi, ce régime est très riche
en graisses saturées.
Même chose pour les Tokelauiens, situés dans un archipel du
Pacifique dépendant de la Nouvelle-Zélande, qui se nourrissent de noix de coco
et de poisson.
Or, les uns comme les autres ont de très faibles taux de
décès par maladie cardiovasculaire.
Ce fait est corroboré par la très riche teneur en graisses
du lait maternel humain, formé à 54 % d'acides gras saturés. Le lait maternel
étant l'aliment le plus parfait pour les bébés en croissance, la présence de
fortes quantités de graisses saturées n'est certainement pas une « erreur de la
nature ».
En 2010, une très importante étude, portant sur plus de 347
000 personnes, n'a constaté aucun lien entre la consommation de graisses
saturées et le risque d'infarctus, d'attaque cérébrale (AVC) ou d'autres
maladies cardiovasculaires. (1)
Une autre étude publiée en 2010 dans la revue médicale
American Journal of Clinical Nutrition, a montré que les personnes qui
souhaitent diminuer leur risque cardiovasculaire ne doivent pas diminuer leur
consommation de graisses mais plutôt réduire celle de glucides, dont les
féculents et l'amidon (et donc le pain, les pâtes, les céréales, y compris
complètes). (2) Les personnes qui diminuent leur consommation de graisses saturées,
et les remplacent par des glucides raffinés (pain blanc, pâtes, pomme de terre)
augmentent leur résistance à l'insuline, leurs problèmes d'obésité, leur
dyslipidémie (niveau anormal de lipides dans le sang), leur niveau de
triglycéride et de cholestérol.
En fait, la nouvelle mode qui sévit depuis les années 60, et
qui consiste à manger plus de glucides (surtout des céréales) et moins de
graisses, est responsable d'une telle hausse de l'obésité, du diabète et des
maladies cardiaques qu'il est devenu presque impossible pour nos contemporains
de se souvenir que, il y a seulement un siècle, moins d'une personne sur cent
était obèse (y compris aux Etats-Unis !) et les maladies coronariennes étaient
pratiquement inconnues.
Plus difficile à croire encore, il n'y avait en 1950 que 100
cardiologues exerçant en France ! Ils étaient 2 200 en 1981 et sont près de 6
000 aujourd'hui ! (3)
Une telle explosion indique que quelque chose a changé, qui
explique l'épidémie.
Et quel est ce quelque chose ?
Notre alimentation !
Car s'il est vrai que nous consommons beaucoup de viande
rouge et de graisses saturées, notre régime alimentaire est aussi
dangereusement riche en sucres et glucides raffinés.
Les aliments les plus consommés sont les plus mauvais
Les aliments qui arrivent en tête de la consommation dans
les pays industrialisés sont le pain, les céréales, les sandwichs, les pâtes,
les pizzas, les biscuits, les gâteaux, les desserts en tout genre, les chips,
frites et biscuits d'apéritif à base de pomme de terre, qui sont des glucides.
La plupart des publicités pour des produits alimentaires les concernent, car
tous ces produits sont faits à partir des matières premières les plus bas de
gamme, et les moins chères.
Par contre, si vous y ajoutez beaucoup de sucre ou de sel,
arômes et colorants, et que vous les présentez dans de beaux emballages
multicolores, vous pouvez les revendre avec une marge importante. Cela permet
de financer les investissements en marketing, tout en assurant la rentabilité
du fabricant.
Il est beaucoup plus difficile de faire de telles opérations
sur des produits qui sont déjà très chers à la base, comme les huiles de bonne
qualité, les bons légumes, la viande, le poisson, les noix ou les fruits
rouges, qui sont bons pour la santé. C'est pourquoi les publicités pour ces
produits là sont rares, pour ne pas dire inexistantes.
Les bonnes graisses à manger
Beaucoup de personnes s'emmêlent les pinceaux entre les
graisses polyinsaturées, mono-insaturées, les acides gras trans, les oméga-3, 6
et 9.
Les bonnes sources de graisse sont :
l'huile d'olive (et bien sûr les olives entières, la
tapenade...)
les noix et amandes crues, ainsi que l'huile de noix et
l'huile d'amande, mais aussi les noix de pécan, les noix de macadamia, les noix
du Brésil, et dans une moindre mesure les noisettes. Faites toutefois très
attention en les achetant. Il devient de plus en plus difficile d'acheter des
noix crues de bonne qualité. Elles sont très souvent rances, ce dont vous vous
apercevez facilement car le goût est piquant. Cela veut malheureusement dire
que les acides gras polyinsaturés qu'elles contiennent sont oxydés, et sont
donc devenus mauvais pour la santé ;
les graisses animales d'animaux élevés en plein air et
nourris d'aliments biologiques ;
les œufs bios et surtout les œufs de poules nourries de
graines de lin (riches en oméga-3) ;
les avocats ;
le beurre de vaches nourries à l'herbe (et non aux céréales
et au tourteau, comme la plupart des vaches européennes) ;
l'huile de noix de coco et l'huile de palmiste, qui sont les
meilleures huiles à utiliser pour les fritures car elles ne se dénaturent pas à
haute température (attention toutefois à ne jamais les faire fumer) ;
les poissons gras (sardines, maquereaux, anchois, harengs)
et l'huile de poisson, dont bien sûr la célèbre huile de foie de morue,
malheureusement tombée en désuétude et victime d'une terrible réputation, alors
que, très franchement, son goût n'est pas du tout si mauvais qu'on le raconte
aux enfants.
Quel est votre ration oméga-3/oméga-6 ?
Il est aussi capital de surveiller que vous avez un bon
équilibre entre vos apports d'oméga-3 et d'oméga-6. Traditionnellement, ce
rapport était de 4, 3 ou 2 pour 1, mais il est aujourd'hui beaucoup plus
souvent de 20 pour 1, voire de 30 pour 1. Les oméga-6 sont en effet présents
dans les huiles bon marché (huile de tournesol et de maïs) que l'on retrouve un
peu partout, notamment dans la nourriture industrielle, alors que les oméga-3
se trouvent dans l'huile de noix, de lin et de colza, et les huiles de poisson,
moins répandues et plus chères.
Malheureusement, manger trop d'oméga-6 et trop peu d'oméga-3
entraîne un état chronique inflammatoire dans votre corps, ce qui augmente
votre risque de maladie cardiovasculaire et de cancer.
Faites ce que vous pouvez pour réduire votre consommation
d'oméga-6 et augmenter votre consommation d'oméga-3. A noter que l'huile
d'olive ne contient ni l'un ni l'autre, mais c'est une huile qui est
globalement bonne pour la santé, à partir du moment où elle est extra-vierge et
issue de première pression à froid, et consommée crue ou faiblement chauffée
(pas de friture à l'huile d'olive ; utilisez pour cela de l'huile de coco, de
l'huile de palmiste ou de la graisse de bœuf).
La graisse à éviter à tout prix
Les acides gras trans, eux, sont à éviter à tout prix. Ce sont
des acides gras généralement issus du traitement industriel des huiles, qui
sont hydrogénées pour les rendre solides, et fabriquer des margarines, ou
donner du moelleux et de la tenue aux plats préparés, biscuits, gâteaux.
Les graisses ainsi fabriquées se conservent plus longtemps
dans les entrepôts et les rayons des magasins, mais ils produisent de graves
dysfonctionnements à l'échelle cellulaire.
Votre corps a BESOIN de graisse pour fonctionner de façon
optimale
Malgré tout ce que je vous ai dit ici, je sais bien que,
comme tout le monde, vous continuerez à vous méfier des plats « trop gras ». Ne
vous impatientez pas. Il faut bien voir que, depuis notre plus jeune âge, nous
avons été littéralement conditionnés pour croire que les graisses sont mauvaises
pour la santé, et que ce sont les céréales, si possibles complètes et si
possible avec le moins d'accompagnement, qui sont bonnes pour la santé.
Il n'est pas facile de se convaincre que c'est en fait
exactement le contraire. Que dans une tartine de pain beurré, ce qui est
mauvais, c'est le pain, et ce qui est bon, c'est le beurre. Et que dans une
frite, ce qui est mauvais, c'est la pomme de terre, et ce qui est bon, c'est la
graisse ! Bon, j'admets que j'exagère sur ce dernier point, car la frite pose
le problème d'être cuite à trop haute température (220 à 240 °C), ce qui rend
la graisse toxique et produit un phénomène de « glycation » très néfaste pour
la santé.
Mais vous voyez tout de même le message que j'essaye de
faire passer. Les graisses saturées sont indispensables pour la santé, et
aident votre corps à mieux fonctionner. Elles assurent un grand nombre de
fonctions importantes, dans le cœur, les poumons, le foie, les os, le système
immunitaire. Elles entrent dans la composition de vos hormones, des membranes
de vos cellules, et régulent le sentiment de satiété.
Un des énormes désavantages des régimes pauvres en graisse,
en effet, est de provoquer un sentiment irrésistible de faim, qui provoque
mauvaise humeur, énervement, voire déprime et perte du goût de vivre.
Ces tortures ne sont ni nécessaires, ni bonnes pour la
santé. Et ça, il me semble que c'est tout de même une très très bonne nouvelle.
A votre santé !
JMD
Retrouvez mes meilleures chroniques dans L' Intégrale Santé
Naturelle (J.-M. Dupuis, 2013, SNI éditions, 384 p.) disponible ici (lien
cliquable). Tous mes droits d'auteur seront reversés à l' Institut pour la
Protection de la Santé Naturelle, association sans but lucratif qui défend le
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